Écrits

Loïc Hervé 2018

Les deux nouvelles séries de sculptures de Loïc Hervé, Exil et Bouteilles à la mer, sont inspirées par la résistance et la tendresse.

Dans un monde où les rêves viennent se briser aux rives douanières de l’indifférence, ou s’échouer sous un linceul de sable ou de mer, le sculpteur offre son vocabulaire, celui du cuivre oxydé, de l’acier, du verre et du textile pour dire la puissance de vie et d’espoir qui anime les dreamers anonymes venant de tous les horizons. Exode, Exil, Eldorado : ces mots qui portent les rêveurs toujours plus avant, un pas après l’autre, le souffle court, ces mots enchâssés dans les sculptures de Loïc Hervé et dont les racines sont la peur et l’espérance, nous sont adressés. Quel sens saurons-nous leur donner

C’est à pied d’homme que les rêves parcourent le monde. Mais pour l’homme debout et en marche dans la dignité, les jambes sont le symbole de la fierté et de la mémoire vive de ses multiples résistances : à la souffrance des fatigues et des pertes inconsolables, à la nostalgie de l’enfance et du sol natal qui se dérobent, à la méfiance violente des autres dont le silence se fait mur.

Passé le rivage, l’espoir de nombreux rêveurs s’engloutit. La profonde tendresse poétique des sculptures de Loïc Hervé donne à voir, au-delà de chaque visage qui s’éteint, abandonné en marge d’un sillage, la trace persistante du désir de vivre. Comme le message d’une bouteille jetée à la mer.

Philippe Gouêt novembre 2018

Une sculpture du paradoxe

Je ne représente pas. J’interroge.

Eduardo Chillida

Le sculpteur rennais Loïc Hervé s’inscrit dans cette démarche de Eduardo Chillida, mais il faudrait ajouter à son interrogation du monde son désir de le transgresser en le recomposant selon sa fantaisie, car l’artiste emprunte au réel des éléments qu’il assemble, créant ainsi un véritable univers singulier, toute une mythologie personnelle où l’onirisme flirte souvent avec la tragédie. L’œuvre de Loïc Hervé est duale, un peu à l’image de la montagne. Son adret offre des œuvres délicates et poétiques, marquées par le rêve et l’humour, révélant un esprit d’enfance. Son ubac au contraire représente sous forme d’installations des œuvres plus engagées, comme celle intitulée « Lignes brisées » qu’il a présentée au Centre d’Art Passerelle à Brest en 1999 sur le massacre rwandais. L’univers de Loïc Hervé oscille entre des sculptures pérennes et des œuvres éphémères et factuelles qui composent avec les lieux d’exposition. Mais ces deux versants de l’œuvre ne sont pas si antinomiques que cela. Il ne faut nullement y voir une rupture ou la désertion d’un lyrisme pour un chant plus saccadé et scandé. Au contraire, on observe des interférences thématiques et sémantiques. Ses sculptures, déclinant ses paysages maritimes, relèvent de l’ex-voto ou du mausolée, dont d’ailleurs l’une de ses oeuvres porte ce titre, témoignant ainsi des tragédies maritimes. Les autres, par la mise en scène des icônes religieuses et par leur ironique et troublante désacralisation, dénoncent aussi les dérives de toute forme d’idolâtrie.

Un nomadisme dans la conscience des hommes

Le voyage ainsi que son expérience des campagnes de pêche à Terre Neuve ont permis à Loïc Hervé de découvrir des cultures diverses, d’être confronté à la solitude et d’éprouver l’expérience du temps. C’est dans cet itinéraire de ruptures que le sculpteur a trouvé son écriture, en se démarquant de la sculpture classique enseignée lors de ses études. L’artiste parle de « cheminement nomade à travers des paysages, mais aussi à travers les images offertes par la vie des hommes ». Ce nomadisme dans les coulisses du monde a forgé son regard et favorisé son audace créatrice. Et le choix des matériaux et des techniques pour réaliser ses greffes insolites est comme un héritage de ses longues campagnes de pêche, éclairant ainsi l’importance de l’univers maritime dans son œuvre.

Une composition cubiste et un art du détournement

Loïc Hervé appartient à ce qu’on a appelé « l’ère de la polymatérialité » ou des techniques mixtes, car l’artiste réalise ses sculptures en assemblant le cuivre, le bronze, le granit, mais aussi le marbre, la corne et encore la faïence et même le plastique, à la manière des cubistes et des surréalistes comme notamment Kurt Schwitters, Raoul Haussmann ou encore Marcel Duchamp, Pablo Picasso et Johannes Baader. La diversité des matériaux utilisés caractérise bien son écriture. Et chaque matière induit une histoire et une géographie qui confèrent aux sculptures une dimension polyphonique. Ses œuvres sont faites d’outils qu’il détourne, mais aussi d’éléments dérobés à la statuaire religieuse, à l’architecture classique. Aucun « hétéroclysme » dans ces associations audacieuses. Il faut y voir plutôt une mise en scène orchestrée selon un enjeu précis. Loïc Hervé les détourne certes de leur fonction initiale en les assemblant pour condenser un univers singulier. L’artiste cherche l’équilibre et l’harmonie chromatique, matérielle et sémantique. Cette fusion esthétique revendiquée est l’occurrence même de l’œuvre. En procédant ainsi Loïc Hervé développe l’art du paradoxe et illustre fort bien l’image poétique telle que l’a défini Pierre Reverdy : « elle ne peut naître d’une comparaison, mais du rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées ». On évoque ainsi la figure du compas ouvert qui a fait la richesse de l’image surréaliste. Les combinaisons de matériaux, mais aussi les motifs associés engendrent un surprenant imagier poétique, un paysage d’images insolites et originales. D’ailleurs le sculpteur intitule certaines œuvres « paysage transporté » comme ce poisson qui semble flotter dans l’encadrement d’une valise posé sur un pied incongru ou encore cette petite maison en équilibre sur la tige d’une branche de palmier comme sur la crête des vagues. Cet onirisme rappelle certains tableaux de René Magritte mais aussi les collages de Jacques Prévert, où le rêve seconde l’image suggérée par ce condensé d’éléments comme apportés par la marée des jours sur la grève de son imaginaire. Dans ces sortes d’oxymores sculptés, Loïc Hervé intègre parfois le titre des œuvres, composant ainsi un long poème épars.

Une présence virtuelle du corps

Loïc Hervé en réalisant son installation sur le Rwanda a « recorporalisé » le thème de la guerre. Point de corps visibles comme dans les peintures de guerre ou dans les sculptures classiques ou funéraires, mais un corps latent, paradoxalement démultiplié, spatialisé. Le lieu même de l’exposition devient ce corps blessé et le spectateur ne peut échapper à son omniprésence. En regardant l’œuvre il pénètre ce corps suggéré par ces centaines de pioches et de fourches plantées dans la chair des murs et du sol. Le visiteur fait ainsi l’expérience de la douleur, de la violence et établit un lien intime avec l’œuvre, car « la lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil » écrivait René Char. Les manches fracturés favorisent la mutation de ses outils en instruments de mutilation. Cette ligne brisée rejoint les brisures de l’Histoire et la perte des valeurs humaines. Le rouge et le noir de l’acier de ces armes improvisées accentuent davantage leur accession à l’ère de la barbarie. Ces manches brisés, qui évoquent au poète Yves Bergeret les membres articulés des marionnettes en bois, sont indubitablement mécaniques et traduisent une mécanique de mort qui s’est emballée pendant le génocide rwandais. Cette pluie de pioches et de fourches traduit bien la calamité des forces primitives et peut-être la désertion des Dieux en ces temps de détresse. Dans ces sculptures récentes, l’outil est coiffé d’un casque de la guerre de 14-18 et d’une couronne de chêne et de barbelé. Le manche convulsé apparaît ici comme un trait d’union entre deux époques et comme le passage de témoin entre les massacres d’hier et ceux d’aujourd’hui. L’installation « Le repas des Bourreaux », représentant 15 000 cuillers et fourchettes plantées dans les murs de la salle d’exposition de Grand Cordel à Rennes en 2001 suggèrent ici aussi ces corps absents. Et les grains de riz contenus dans les cuillers, sont ces pépites alimentaires nécessaires à la vie des peuples d’Afrique et d’ailleurs exposés aux sécheresses et aux conflits tribaux. Leur blondeur évoque le soleil meurtrier, le mur, la chair des corps ou l’ingratitude des sols. La multitude des cuillers est comme des épis de riz d’une moisson qui n’aura jamais lieu. Les œuvres engagés de Loïc Hervé n’ont pas besoin de tous ces discours. Rilke n’écrivait-il pas que « les œuvres de l’art sont d’une infinie solitude ». Leur mise en scène suffit à révéler l’enjeu. Elles rappellent ce terrible poème de Guillevic sur « Les charniers », où le poète invite le lecteur à s’allonger près de ces corps meurtris pour leur rendre hommage, mais aussi pour éprouver l’horreur de sa propre peur et pour toucher la conscience de sa propre inhumanité.

Le sacrifice des idoles

On retrouve cet engagement dans d’autres œuvres récentes, que l’artiste présentera en mai 2009 à la Galerie Lélia Mordoch à Paris et où il utilise l’humour et l’ironie pour désacraliser les icônes religieuses qui hantent récemment son univers. Alors que les outils mutants induisaient des corps martyrisés, Loïc Hervé réintroduit le corps, mais paradoxalement en le démembrant. Ainsi le Christ équarri, qui a perdu son intégrité, sa dimension statuaire et religieuse, est remis en scène. Il devient sans sa croix, les bras au ciel, équilibriste-forain sur une roue. Parfois le tronc est encastré dans la tôle d’un bidon de pétrole de la Shell planté de haches. Cette collision entre le profane et le sacré révèle bien la concurrence entre les valeurs religieuses dévoyées et la loi de l’argent, mais aussi la mise en péril de la création divine souillée par les pétrodollars et les marées noires. Les anges et la vierge occupent aussi des positions bien singulières. Une vierge à la poitrine accueillante ou plus sage posée sur une bouée semblant échapper au naufrage des valeurs religieuses traduit bien cette distance ironique, tout en dénonçant leur mercantile utilisation dans un décor parfois apprêté.

L’œuvre de Loïc Hervé est un coup de lame dans l’opacité du monde. Et la petite ampoule malicieuse qui éclaire ses paysages marins où veillent ses « Balises West » et « Nord West » révèle la magie de ses portulans. Il dépose aussi sur notre regard la saveur du sel qui vient oxyder notre meurtrière indifférence. Ses installations aux allures de forêts inquiétantes ou de tourbillons dévastateurs font de Loïc Hervé le Sisyphe de ses interrogations. Il veut éviter que les fourmis de l’oubli ne dévorent ces corps suppliciés et peut-être contredire le constat amer du poète ivoirien, noël Ebory qui écrit que «les grilles de la nuit se sont refermées sur nos colères et nos humiliations ».

Alain Le Beuze (1) – 2008

(1) Alain Le Beuze, poète, a collaboré aux revues Cimaise, Europe et au magazine DEdiCate. Il a publié des articles sur des artistes, notamment Yves-Marie Péron, Jean-Yves Pennec, Jean-Pierre Baillet, Michel Thamin, Rodolphe Le Corre, Isabelle Boucher, ainsi que des préfaces de catalogues et d’exposition pour L’ Art dans les Chapelles, L’Art chemin faisant, Le Centre d’Art Passerelle, Le manoir de Kernault. Il a réalisé des livres d’artistes avec Thierry Le Saëc et Jean-Claude Le Floch, mais aussi des films avec Marcel Léal sur le livre d’artiste et « Lumière apprivoisé, genèse d’un vitrail »sur les vitraux d’Yvon Daniel pour la chapelle St Antoine de Guiscriff. Il a publié récemment, Graffure de nuit avec la photographe V. Brod aux Editions Apogée.

La mémoire et la mer

Un jour il faut partir,
Donner leur chance
Aux promesses dont l’horizon inonde l’enfance,
Et répondre par un clair exil
Aux sourires entrevus dans la marge mauve des nuages.

Alors, après avoir serré dans un vaste mouchoir
Les familles et les larmes, les travaux et les corps,
L’amour, les silences, les rires et les promenades ;
Après avoir fixé d’un regard tranquille
L’empreinte pluvieuse des sillons,
L’œil noir du cheval dans la brume verte du pré,
Et les repas du soir aux modestes guirlandes des fenêtres,

Un jeune et tendre oubli, envahi de pâleur
Laisse la mer le prendre par le cœur.

Naïf et nu, au seuil des marées, il croit tout quitter.
Car s’il ferme les yeux, il embarque en remorque d’un pégase
Aux nageoires piquées de lambeaux scintillants d’outre mer.

Partir il le faut : le temps commence au milieu du monde,
Et partir, toujours, est un nouveau jour.

D’insolentes risées viennent battre au talon de pierre de la jetée
D’où son âme, dessinée comme un portulan, glisse lentement.
Déjà les hauts fonds résonnent de la rumeur des machines,
Et le grincement railleur du cabestan au travail
Eclaire son regard d’une soudaine et joyeuse obstination.

Il est l’œuf de terre promis à la mer,
Sourd aux clameurs des petits mondes,
Enchâssé aux machines d’un désir de désir sans mémoire,
Une hélice pour déchirer le temps, un gouvernail barré sur l’infini.

Il ne devine pas encore le clandestin viatique qui l’accompagne,
Patient insigne d’un oubli qui ne peut demeurer dans l’oubli,
Ironique attente d’un combat qui va reprendre en son cœur
Entre la Terre qui l’épie et la Mer qui le guette.

Bien sûr, dans les ports et sur les îles
Il goûte au lait de la mère de tous les saints,
Et lit, ébloui, dans des mains noires où brillent des cauris,
Les lignes chaudes et luisantes de l’énigmatique dessin
De la vie offerte à la puissance sans nom des lendemains.

Mais lentement, sous le voile noir et bleu que se disputent les becs d’écume,
Les riches heures de l’oxyde allument de tranquilles et vertes lueurs :
Une maison sous la mer, petite, si petite,
S’éclaire d’une grave et sereine vigilance.

Posée comme une caresse à la hanche du navire,
Embrassant d’un courant de tendresse l’ancre lourde du désir
Une minuscule maison qui contient toutes les cartes du monde
Irradie la joie promise du retour de l’oubli dont la pâleur s’efface
Dans le refus d’abandonner pour toujours son cœur à la mer.

L’anneau du quai, témoin de la Terre maintenant aux aguets,
Scelle, l’instant d’un improbable mascaret,
La fin de la lutte du flux et du reflux, du départ et du retour.
Et lorsque, loin de la jetée, la Mer fuit enfin,
Elle découvre la mémoire riche et dorée d’un temps épuisé
Qui revient aux sources blotties dans les marges du monde.

Jusqu’au prochain oubli.
Jusqu’à ce nouveau jour.

Philippe Gouët
Avril 2002

Paris – Nord West – Galerie Lelia Mordoch

Loïc Hervé dans sa prochaine exposition « Nord West » nous convie à un voyage en Bretagne. Chaque œuvre est un paysage transporté, chaque sculpture est une île à la dérive, un radeau à la merci de l’océan, de ses tempêtes et de ses délices. La chambre à air qui sert souvent de fondement aux cuivres oxydés et au granit de la terre bretonne est une bouée sur laquelle s’enracine l’église, la maison, le phare…
Comme vous l’avez peut-être deviné, Loïc Hervé est un sculpteur breton, un homme de contraste, un être de terre et de mer, de paysages qui fusionnent dans le non dit de la voile qui disparaît à l’horizon avant que l’homme ait pris conscience de la forme de la terre.

Pourquoi « Nord-West » ?
360°/270°, d’une rive à l’autre du soleil, les îles voguent dans les nuages. Loïc Hervé veut nous transporter dans l’isolement et la solitude de ces terres comme Belle-île, Hoëdic, Ouessant… qu’il apporte, lui magicien de l’ici et de l’ailleurs, jusque dans nos rues parisiennes où parfois daigne souffler un vent d’ouest égaré sur la Seine à travers ses paysages.

C’est un morceau de Bretagne à Paris que les amoureux de bout du monde pourront venir découvrir à la Galerie Lélia Mordoch.

Lelia Mordoch
Paris – Avril 2000

Rennes – Fragment de Paysage – Galerie Ombre et Lumière

« Avec une sorte de fraîcheur directe, Loïc Hervé vous fait entrer de plain pied dans son monde. Vous passiez innocemment votre chemin et voilà qu’on vous interpelle d’un rire bien clair. Incisif Serein.
Vous regardez. Vous voyez du vert pâle, soyeux comme de la poudre à joue : le cuivre oxydé. Du blanc velouté comme neige : le grain du papier, le grain du marbre. Du brun, comme bon humus: l’argile.
En tout cela : matériaux simples, formes libres, équilibres légers, beaucoup d’air et de place aimable pour le vent, pour la lumière et pour toutes sortes de choses que l’on ne saurait dire.
Cependant si on y regarde de plus près, gare ! Vous touchez la sculpture, il vous reste sur les doigts du vert-de-gris : un poison discret et efficace. Vous caressez le bord de la sculpture : qui s’y frotte s’y pique ! Fine accroche, fine épine.
Partout finesse apparente. Rien n’insiste. Minces feuilles de cuivre, lambeaux de boyaux, fils de cuivre, bris de marbre. Le marbre paraît friable ; le cuivre s’oxyde et se détruit. Ces matériaux hétéroclites, Loïc Hervé les attrape les uns et les autres en pleine corruption, les fige dans de petites mises en scène et vous les organise en subtils et alertes dialogues tout en temporaire et subtil équilibre (ou déséquilibre ?) entre la corruption destructrice et l’intelligence ordonnatrice.
Loïc Hervé nomme en éludant, montre en esquivant. II vous surprend par des équilibres légers de matière et de forme; il concilie même des notions de l’art dont il marrie dans une sorte d’humour étrange et héroïque les antipodes, le dessin et la sculpture. Paul Klee sans doute aurait été loin de désapprouver l’architecture de ces petits mausolées pour âmes vagabondes. »

Yves BERGERET –  1995

Luxembourg – Trace mémoire – Galerie La Cité

« Traces mémoire, c’est le titre que Loïc Hervé donne à ses sculptures. Il me semble que le mot sculpture n’est pas le terme qui définisse correctement les œuvres de cet artiste français ; on pourrait plutôt parler d’objets.
Acier rouillé, plomb, plexiglas, papier huilé, béton, paille et fusain donnent naissance à des formes, des lignes et des signes qui suivent en nomades les souvenirs.
Les souvenirs de longs séjours en Afrique que l’artiste essaie de retenir dans sa conception et dans son expression. Le climat, les hommes, le paysage, l’architecture, les coutumes, il y a tout cela dans ses travaux.

Et l’on ressent autre chose encore : l’équilibre, le calme, l’éternel, le temps. S’il y a une tension dans certaines œuvres, le moment du repos est important aussi. Il y a dans les travaux de Loïc Hervé cette attente léthargique de quelque chose, ce sentiment du temps indéfinissable – ou plutôt, l’absence de sentiment du temps – cette inévitable indifférence devant les événements.

La rouille de l’acier et la légèreté du papier huilé, souvent reliés seulement par un mince fil de fer, apposent aux objets le sceau du temps mais aussi leur donnent un caractère périssable, provisoire. Et c’est cette tension, doublée d’une légèreté harmonieuse, qui fait la force des œuvres de l’artiste. »

Elisabeth Vermast
Mars 1990